Dans cet article, nous vous proposons un petit récapitulatif des différents aménagements cyclables existants et un comparatif de leurs avantages et inconvénients.
En complément de cet article, nous vous conseillons la lecture de l’article réalisé par Isabelle Lesens, experte reconnue au niveau national sur les questions de mobilité et notamment du vélo, suite à sa visite à Bourges en mars 2013.
Bourges, la ville des axes partagés – Isabelle Lesens – 29 Mars 2013
En deuxième complément, nous vous conseillons également l’écoute de cette émission diffusée en Novembre 2013 sur les ondes de RCF en Berry sur le thème des aménagements cyclables.
Axe partagé
Bourges est la championne du monde de l’axe partagé *. Notre capitale a en effet servi de test à ces aménagements qui ne se sont pas révélés efficaces, raison pour laquelle vous ne retrouverez ces aménagements qu’en de très rares occasions (notamment à Montpellier ou à Rouen, rue Jeanne d’Arc). Malgré le fait qu’il n’ont aucune valeur légale et réglementaire certains axes continuent à être entretenus par la mairie arguant du fait que « c’est toujours mieux que rien ».
L’axe partagé est peint au sol et invite, comme son nom l’indique, les usagers de la route à « partager l’espace » car la circulation des véhicules motorisée y est autorisée. Or, s’il est aisé pour un automobiliste faisant preuve de bonne foi de partager l’espace avec un cycliste, ce dernier a quant à lui besoin d’un minimum d’espace vital pour se sentir en sécurité.
Le sentiment de peur lié au partage inégal de l’espace qu’imposait les axes partagés ayant dissuadé nombre de nos concitoyens, l’augmentation de pratique du vélo attendue par l’implantation de ces aménagements n’a pas été au rendez vous et le projet a été enterré.
* lire à ce sujet l’article d’Isabelle Lesens sur son blog Isabelle et le vélo en cliquant ici. Elle préconise en outre que les axes partagés soient transformés en bandes cyclables pour créer des chaucidous (voir ici et là pour plus de détails sur ce type d’aménagement).
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Bande cyclable
Mieux que l’axe partagé, la bande cyclable garanti au cycliste un minimum d’espace pour se mouvoir étant donné que la circulation des véhicules motorisés y est interdite et qu’elle doit faire au minimum 1,20m de large*.
Elle est matérialisée au sol à l’aide de peinture ou par un revêtement de couleur différente à celle de la chaussée et n’est pas physiquement séparée de celle ci. Les rares séparations que l’on peut observer sur des bandes cyclables sont des petits plots de caoutchouc, une bande de pavés lisses… des obstacles tout à fait surmontables par un véhicule (pour aller rejoindre des espaces de stationnement, tourner dans une rue…).
La bande cyclable présente plusieurs avantages : implantation aisée et peu coûteuse ce qui permet une extension rapide du réseau, entretien ne nécessitant pas d’appareil spécifique… de plus, il est prouvé que faire cohabiter les modes de transport sur une même voie a des effets bénéfiques pour la sécurité des uns comme des autres et diminue le risque d’accidents impliquant des cyclistes, notamment au niveau des intersections **.
La bande cyclable est considérée par bien des professionnels de la voirie et d’associations d’usagers comme un aménagement idéal en milieu urbain dense (vitesse maximum limité à 50km/h, trafic modéré, présence occasionnelle de véhicules lourds).
Ceci étant, la bande cyclable présente deux inconvénients majeurs, à savoir :
- ne pas être totalement en site propre ce qui peut effrayer les cyclistes débutants, personnes âgées, enfants du fait de la trop grande promiscuité avec les véhicules motorisés.
- ne pas avoir autant d’ « allure » qu’une piste cyclable qui, pour un élu, reste un moyen de promotion visuel très efficace lors des élections.
Notons également qu’à Bourges, la présence d’axes partagés et de bandes cyclables ne facilite pas l’identification des aménagements et que beaucoup d’automobilistes (mais également de cyclistes) confondent bien souvent les deux. Ainsi, il n’est pas rare de voir des véhicules circuler sur des bandes cyclables où ils n’ont en théorie rien à faire.
De plus, il n’est pas rare que des bandes cyclables plutôt convenables disparaissent tout simplement suite à des travaux de voirie comme sur l’exemple ci dessous. Plusieurs cas semblables sont à déplorer à Bourges : avenue Francois Mitterrand, rue Barbes, rue de Sarrebourg… un manque de suivi qui conduit à voir disparaitre des aménagements.
* recommandation du CERTU (Centre d’Etudes sur les Réseaux, les Transports et l’Urbanisme), organisme dépendant du Ministère de l’Écologie, du Développement et de l’Aménagement durables. Cette largeur est un minimum, le CERTU conseille en effet une largeur de 1,50m.
** voir à ce sujet cette étude allemande (qui date un peu car elle est de 1991) qui montre que l’implantation d’une piste cyclable sur un axe ou la circulation était auparavant mixte (vélos & voitures sur la même voie) a augmenté de près de 50% les accidents impliquant un vélo au niveau des intersections. Sur la section courante (en ligne droite), les accidents vélos – voitures ont en revanche nettement diminué (-34%) au dépend des accidents avec les autres usagers, majoritairement piétons qui eux ont augmenté de 76%.
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Cet aménagement est idéal en cas de fort trafic routier, quand les vitesses maximales sont supérieures à 50km/h ou lorsque la section accueille beaucoup de bus ou de poids lourds. Compte tenu du différentiel de vitesse important entre les deux flux, les séparer est dans ce cas un gage de sécurité.
Or, le problème de la piste cyclable est qu’elle est onéreuse et difficile d’entretien car elle nécessite, du fait de la séparation physique, des appareils spécifiques pour être entretenue *. De plus, séparer les flux cyclistes et motorisés peut, suivant les cas, causer plus de problèmes que cela n’en résout. Il arrivera en effet toujours un moment ou la piste s’arrêtera et l’introduction des cyclistes dans le flux motorisé sera délicate et sera propice à des conflits d’usage.
Car pour ce qui est de la sécurité, les statistiques montrent que la majorité des accidents vélo – auto se produisent aux intersections. En section courante (quand la route est droite), les risques d’accidents sont très faibles. Il est donc nécessaire de bien traiter les intersections si l’on veut augmenter la sécurité des cyclistes car c’est ici que se situe le plus grand danger.
Le schéma ci dessus compare les risques d’accidents entre une circulation mixte en noir et un aménagement dédié aux vélos seuls en rouge aux intersections pour différentes configurations d’orientations prises par le cycliste (« je vais tout droit » ou « je tourne à gauche »). On remarque que, suivant les configurations, les risques d’accidents sont de 3 à presque 12 fois plus importants lorsque le cycliste se trouve sur une piste cyclable que lorsqu’il est intégré dans le trafic. D’où l’intérêt de soigner particulièrement les intersections lors de la réalisation de tels ouvrages.
Infographie utilisée dans la rédaction du PDU d’Agglobus.
* voir au sujet de la difficulté d’entretenir des pistes cyclables cet exemple à Annecy
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Voie verte / liaison verte
A Bourges, le meilleur exemple de ce type d’aménagement est la rocade verte qui, à horizon 2015 permettra de faire le tour de la ville à vélo sur des itinéraires sécurisés. Ce type d’aménagement indépendant des autres modes de transports est situé en site propre, à l’écart du trafic et a un but avant tout touristique. La voie verte valorise l’environnement, le patrimoine économique, industriel et la qualité de vie.
Une voie verte est avant tout un espace de balade. La conception de ces voies et les itinéraires qu’elles empruntent ne sont pas optimisés pour les déplacements utilitaires à vélo : utilisation de barrières *, priorité aux flux motorisés, mauvaise distribution des pôles résidentiels, scolaires et d’activités…
De plus, elles ne sont pas réservées aux vélos et accueillent tous les modes non motorisés (piétons, coureurs, rollers, PMR -personne à mobilité réduite- …) ce qui ne simplifie pas le trajet du cycliste et peut être source de conflits.
Mon Cher Vélo s’intéresse à ce type de voies dans le cadre de son rôle de promotion du tourisme à vélo mais ne peut considérer ceux-ci comme des aménagements oeuvrant – du moins directement – en faveur des déplacements utilitaires à vélo.
A Bourges, on observe deux défaut majeurs sur la rocade verte :
- l’utilisation quasi systématique de barrières lorsque celle ci traverse un flux motorisé ce qui est très clairement déconseillé par l’Association Française des Véloroutes et Voies Vertes (AF3V) *.
- l’installation de certaines portions (ave de Dun, Pyrotechnie…) sur trottoir ce qui est également déconseillé par l’AF3V et le CERTU.
Un troisième écueil, moins important mais qui met tout de même, lui aussi, en question l’appellation « voie verte » de cette rocade vélo est la largeur de la voie. En effet, sur certaines portions, la largeur est de 2,50m tandis qu’une voie verte doit être large d’au moins 3,50m.
* depuis sa création, Mon Cher Vélo demande la suppression des barrières de la rocade verte car celles-ci cloisonnent et déresponsabilisent les usagers. Elles sont dangereuses pour le cycliste qui mobilise autant son attention sur l’obstacle que sur la route. Elles sont de plus coûteuses et leur efficacité quant à la lutte contre la présence de deux roues motorisés sur la rocade verte (qui est la raison avancée par la mairie pour justifier leur présence) reste, selon l’association, encore à prouver.
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Zones de trafic apaisé
Il est également possible de créer des zones ou la vitesse maximale autorisée est inférieure aux 50km/h qui sont aujourd’hui la norme en ville. Ces espaces, où la voirie se trouve de fait mieux partagée avec les autres usagers sont propices aux déplacements à pied ou à vélo : « ça roule moins vite, c’est donc moins dangereux, je me sens donc plus à l’aise à pied ou à vélo ».
Mais comme elles ne représentent pas un aménagement uniquement cyclable mais bénéficient à d’autres usagers, nous leur consacrons un autre article que vous pouvez retrouver ici.
Bonjour,
Notre très cher Maire (d’un petit village à 10 mn de Bourges) nous à doté d’une piste cyclable. Cette voie est a double sens dans une rue à sens unique, avec deux rétrécissements qui la reduisent à, à peine 90 cm…
Quand des vélos vont se croiser à cet endroit, l’un d’eux sera forcement en sens interdit…
De quoi se sentir en sécurité, effectivement.
Enfin, les élections arrivent…
Très bon article, sérieux et pédagogique à la fois.
Ping : Ne tombez pas dans le panneau ! | Becancaneries
Autre aménagement absurde qu’on voit se développer de plus en plus : les voies cyclables sur trottoir. A se demander souvent où est censé marcher le simple piéton…